A l’invitation de l’équipe française du Partenariat Européen de la Blockchain, les membres des projets DemAttestULille “Des Attestations Dématérialisées pour l’Université de Lille” et Fr.EBSI “Projet de la France au sein de l’EBSI pour des diplômes 100% numériques et vérifiables” se sont retrouvés pour un webinaire intitulé “La Transformation Numérique des Services de Scolarité de l’Université de Lille”.
Nous vous proposons ici une transcription des échanges, qui constitue un document complet pour tous ceux qui s’intéressent aux enjeux des applications blockchain pour l’éducation et le monde universitaire.
Mai 2021 – Une solution blockchain d’attestations numériques pour tous les diplômé·e·s de l’Université de Lille
Le 28 mai 2021, dans son Communiqué de Presse, l’Université de Lille annonçait :
À partir du mois de juillet, l’Université de Lille va déployer une attestation numérique de réussite pour l’ensemble de ses diplômé·e·s, grâce à la technologie blockchain. Finies les photocopies de diplômes papier envoyés par email aux recruteurs, aisément falsifiables, et dont la vérification et la production sont coûteuses.
Désormais, les étudiantes et étudiants de l’Université de Lille recevront très rapidement après l’obtention de leur diplôme un lien pour afficher une attestation numérique « à valeur probante ».
lls pourront l’envoyer à une entreprise lors d’une candidature et mettre le lien sur leur profil Linkedin. Cette attestation, hébergée sur les serveurs de l’université et reposant sur une technologie blockchain, donnera aux employeurs tous les éléments pour vérifier l’authenticité du diplôme.
Le système sera généralisé à partir de juillet 2021 aux 20 à 25 000 diplômes délivrés par an par l’université. Si des expérimentations ponctuelles ont eu lieu, principalement sur des promotions réduites dans des grandes écoles, l’Université de Lille est la première en France à la déployer à une telle échelle.
L’établissement est en effet très impliqué dans le déploiement d’infrastructures numériques pour des services publics de confiance, reposant sur des technologies blockchain. Il a été lauréat début 2021 d’un appel à projet européen pour déployer une telle infrastructure européenne en France et y installer un système de certification, Fr.EBSI. L’expérience acquise par l’Université de Lille servira ensuite à l’ensemble des établissements d’enseignement supérieur.
Fin octobre 2021, près de 15 000 attestations blockchain de réussite au diplôme ont été émises et envoyées aux diplômés de l’Université, en lien avec le projet gouvernemental français Fr.EBSI, visant à émettre des diplômes dans l’écosystème blockchain EBSI – European Blockchain Service Infrastructure.
A l’invitation de l’équipe française du Partenariat Européen de la Blockchain, les membres des projets DemAttestULille “Des Attestations Dématérialisées pour l’Université de Lille” et Fr.EBSI “Projet de la France au sein de l’EBSI pour des diplômes 100% numériques et vérifiables” se sont retrouvés pour un webinaire intitulé “La Transformation Numérique des Services de Scolarité de l’Université de Lille”.
Nous vous proposons ici une transcription des échanges, qui constitue un document complet pour tous ceux qui s’intéressent aux enjeux des applications blockchain pour l’éducation et le monde universitaire.
Agenda du webinar
- Pourquoi le choix d’une technologie blockchain : le projet européen fr.EBSI
Pierre BOULET, vice-président Transformation Numérique, Perrine de COETLOGON, coordinatrice fr.EBSI & DemattestUlille
- Transformation numérique des diplômes : de la demande de la scolarité au choix d’une solution blockchain européenne
Bénédicte GAUTIER, Directrice de la Scolarité, Université de Lille
- Résultats DemattestUlille : diplômes dématérialisés pour l’Université de Lille
Imane CHAABI, Directrice adjointe de la Scolarité, Tony DELETTREZ, Chef de service scolarité de la Faculté des Sciences Juridiques Politiques et Sociales
- Avantages des standarts blockchain pour les solutions de Digital Credentials
Luc JARRY-LACOMBE, CEO et cofondateur de Blockchain Certified Data – BCdiploma
- Questions et réponses
Ouverture des échanges
Perrine de COETLOGON, Université de Lille, Board Member à Open Education Global, représentante de la France à l’European Blockchain Partnership – EBSI :
Bonjour à tous. J’ai le plaisir de vous recevoir pour ce webinaire sur l’actualité du Partenariat Européen de la Blockchain – France, et plus particulièrement consacré au cas d’usage « diplôme ». Il s’agit aujourd’hui d’aborder la manière dont l’université de Lille opère la transformation numérique de sa scolarité et de l’émission des attestations numériques de réussite aux diplômes et aux certificats.
I) Pourquoi le choix d’une technologie blockchain : le projet européen fr.EBSI
Contribution de Pierre BOULET, vice-président Transformation Numérique, Université de Lille. Bonjour à tous. Pourquoi transformer la fonction de scolarité de délivrance des diplômes dans une université ?
L’objectif est tout d’abord de permettre aux étudiants de bénéficier d’une meilleure insertion professionnelle et de pouvoir partager aisément leurs diplômes sur les réseaux sociaux. L’attestation que nous délivrons est en effet automatique, traduite en français et en anglais, ce qui permet de mieux postuler à l’international qu’avec les diplômes français.
Il s’agit également de recevoir le diplôme plus rapidement grâce au processus numérique. Pour l’établissement, la modernisation du fonctionnement doit nous permettre de gagner du temps de réponse aux demandes de vérification de diplômes qui émanent de nombreux partenaires ou employeurs.
Ce dispositif doit également accroître la valeur des diplômes, en luttant contre la fraude en la matière. Enfin, à terme, l’établissement pourrait réaliser des économies, car le fait d’imprimer des diplômes sur papier coûte plus cher que d’imprimer des diplômes numériques. Les coûts de fonctionnement pourraient ainsi diminuer dans notre établissement par la suite.
Concernant la technologie à utiliser, nous avons commencé à nous interroger et à observer le marché en 2018. Il s’avère que les technologies blockchain répondent tout à fait à notre besoin, notamment en termes de sécurité, de non-falsifiabilité des diplômes, ou encore de pérennité dans le temps de ces derniers.
La question de la vérifiabilité de la validité des diplômes par n’importe qui se pose également. Des technologies décentralisées permettent de valider aisément ces diplômes émis par un grand nombre d’acteurs, dans des formats standards.
C’est pourquoi le partenariat européen pour la blockchain a considéré qu’il s’agissait ici du premier cas d’usage à mettre en place. Nos diplômes seront ainsi édités demain sur la blockchain européenne d’EBSI, laquelle n’est pas encore en production aujourd’hui. Nous y travaillons, dans le cadre du projet fr.EBSI.
Nous avons d’ailleurs récemment émis nos 14 561 premières attestations de diplômes, et nous avons alors pu vérifier que les étudiants appréciaient véritablement cette modalité de partage.
Contribution de Perrine de COETLOGON. Le Partenariat Européen de la Blockchain concerne 29 Etats membres, ayant signé en avril 2018 une initiative conjointe avec la Commission européenne. Il s’agissait de répondre à plusieurs objectifs, dont :
(i) Se conformer aux standards internationaux en testant une innovation technologique.
(ii) Construire une infrastructure correspondant à tous les acquis européens, notamment sur le plan écologique.
(iii) Assurer une montée en compétence des informaticiens et des développeurs. Un projet financé par le biais d’Erasmus+ a été remporté par l’université de Lyon-I sur ce sujet.
Dans ce partenariat européen de la blockchain, nous testons 7 cas d’usage différents, et le premier à affecter directement les personnes portent par conséquent sur les diplômes.
Nous en venons maintenant véritablement à la transformation numérique, avec Bénédicte Gautier.
2. Transformation numérique des diplômes : de la demande de la scolarité au choix d’une solution blockchain européenne
Contribution de Bénédicte GAUTIER, Directrice de la Scolarité, Université de Lille. Ce projet de dématérialisation s’inscrit dans une dynamique plus large, qui irrigue notre travail dans le métier de la Scolarité depuis de nombreuses années. De nombreux actes, tels que l’inscription administrative en ligne ou les transferts des dossiers étudiants par exemple, ont ainsi pu être dématérialisés par le passé. La démarche, désormais, se poursuit avec les attestations de réussite aux diplômes.
Il ne s’agit pas ici de documents communs. Jusqu’à maintenant, il n’est pas véritablement possible de se séparer du document papier en la matière. Nous avons néanmoins décidé de nous orienter vers la dématérialisation en anticipation des évolutions du corpus réglementaire sur ce sujet.
Le contexte actuel nous permet de faire coïncider un besoin et une technologie, avec l’émergence de cette technologie blockchain. Nous l’avons alors jugée pertinente pour répondre à notre problématique :
Comment répondre aux milliers de demandes que notre service reçoit d’authentification des diplômes ?
Le caractère infalsifiable de la solution blockchain va nous permettre de progresser sur ce sujet.
Par ailleurs, l’établissement et l’étudiant sont placés au centre de la maîtrise des données. Nous nous plaçons ici dans un cadre RGPD très précis.
Le projet en lui-même, à Lille, a nécessité différentes étapes. Il a tout d’abord été nécessaire de déterminer :
A/ Les informations présentées sur l’attestation dématérialisée de réussite au diplôme
Ces informations sont les suivantes :
- Techniques, avec l’intitulé du diplôme, le domaine, la mention, le parcours, la spécialité, l’option crédits, dans le respect du cadrage réglementaire et une traduction en anglais couramment demandée. Je précise qu’aujourd’hui, le corpus réglementaire ne prévoit pas qu’un acte administratif rédigé en français soit également émis dans une autre langue. Nous avons ainsi dû travailler nous-mêmes sur ces éléments de traduction, lesquels ne nous sont pas communiqués par le ministère.
- Individuelles : nom, prénom, date et lieu de naissance, n° INE.
B/ Les extractions de données depuis le logiciel de gestion de l’Université (APOGEE)
Ces extractions fournissent des données variable.
C/ Le design des attestations dématérialisées
Le graphisme, le logo, la couleur ou la police.
Contribution d’Imane CHAABI, Directrice Adjointe de la Scolarité, Université de Lille. Par la suite, les étapes à suivre ont été les suivantes :
D/ Valider l’interopérabilité entre le système de gestion de l’université et l’application blockchain d’émission de Digital Credentials
Les informations issues d’APOGEE et transmises via l’API à BCdiploma concernent uniquement les données des étudiants qui :
- Sont admis à un ou plusieurs diplômes, avec délibérations des jurys closes.
- Présentent un dossier administratif en règle.
Il a également été nécessaire de permettre la révocation des attestations, si certains éléments de délibération étaient remis en cause, notamment pour des raisons disciplinaires.
E/ Déclarer le projet au registre des traitements des données personnelles de l’Université de Lille, à des fins de respect du RGDP
Les étudiants qui reçoivent ces attestations de réussite connaissent exactement quelles données l’université a transmises par le biais de l’API, la durée de vie de ces informations, et les personnes propriétaires des informations – c’est-à-dire l’université de Lille.
Les informations légales à destination des étudiants sont consultables sur cette page.
F/ Valider le processus de mailing et de diffusion des attestations aux étudiants
Nous avons considéré que notre cible concernait des étudiants diplômés, qui n’auront ainsi sans doute plus accès à l’avenir à leur boîte mail institutionnelle. Nous avons dès lors doublé cet envoi des attestations sur les adresses mails personnelles, avec des explications synthétiques permettant de procéder à de la pédagogie sur cette nouvelle technologie blockchain.
Le déploiement se déroule suivant diverses phases. En septembre 2020, 258 premiers lauréats du CLES ont reçu de premières attestations. Ensuite, en octobre 2021, 14 561 bénéficiaires ont reçu leurs attestations numériques de réussite au diplôme.
Ce projet est pour l’heure très concentré autour de la Scolarité, mais les délibérations se déroulent néanmoins dans les composantes. Nous souhaitons ainsi que ce service soit rapidement décentralisé dans ces composantes. C’est pourquoi nous avons travaillé à une interface devant permettre prochainement l’envoi des attestations directement par des référents dans les composantes.
Je passe ainsi la parole à Tony DELETTREZ, responsable Scolarité de la Faculté des Sciences Juridiques Politiques et Sociales.
3. Résultats du projet DemattestUlille: diplômes dématérialisés pour l’Université de Lille
Contribution de Tony DELETTREZ, chef de service scolarité Faculté des Sciences Juridiques Politiques et Sociales.
Nous avons en effet été associés rapidement à ce projet, il y a environ un an, et la Faculté des Sciences Juridiques Politiques et Sociales a souhaité participer au dispositif, en étroite collaboration avec la Scolarité.
Cette faculté comprend 8 500 étudiants environ. Chaque année, nous comptons environ 1 300 diplômés de Licence, environ 1 000 diplômés de Master et quelques centaines de diplômés d’université. Nous dénombrons 3 mentions de Licence et 12 mentions de diplômes de Master, avec 40 parcours. Notre maîtrise de l’outil APOGEE nous permet ainsi de nous associer à ce projet blockchain, avec des informations fiabilisées et sécurisées à transmettre.
Ces parcours nombreux ne sont pas sans conséquence sur notre travail au quotidien, et sur la gestion des dossiers papier, nombreux dans nos services. Une grande difficulté porte ainsi sur le stockage de ces documents archivés. Dès lors, leur dématérialisation doit être engagée. La technologie blockchain nous permet cette dématérialisation des stockages, de façon indéfinie, et participe à la démarche engagée sur ce sujet.
Cette dématérialisation permet ainsi d’avoir à disposition des étudiants des documents à des endroits identifiés, et une gestion simplifiée des archives pour ce qui nous concerne.
Dans la pratique des équipes, nous sommes régulièrement sollicités, à l’instar de la Scolarité, pour répondre à de nombreuses demandes. Les réponses à ces demandes représentent une charge de travail importante, et l’attestation dématérialisée devrait permettre de faire baisser ce nombre de demandes, dès lors que les étudiants auront désormais accès à leur attestation certifiée par l’établissement.
S’agissant de l’accompagnement des équipes, celui-ci demeure à déployer. La composante que je représente sera sollicitée sur des données moins figées en 2021, puisque les délibérations se font dans les composantes. Par conséquent, je serai amené à former mes collaborateurs pour qu’ils dressent une procédure, afin d’identifier quelles attestions peuvent être générées et à quel moment. L’objectif est bien de réduire ce délai de génération au maximum. Idéalement, les attestations devraient être générées dès la sortie des délibérations. Le gain pour l’étudiant serait alors très important, puisqu’il pourrait faire valoir son attestation dès que le jury aurait statué sur sa situation.
Nous devrons ainsi accompagner les équipes pour émettre les attestations le plus rapidement possible, et éventuellement les révoquer si besoin. Bien entendu, nous devons ici nous inscrire dans une démarche d’amélioration continue, avec l’ensemble des services, comme tel est le cas depuis plusieurs mois, pour optimiser les démarches.
Nous nous montrons très optimistes sur cette progression nécessaire et à venir.
Contribution de Perrine de COETLOGON. Vous observez ainsi qu’un travail a été mené sur la transformation numérique au sein de l’université, à la fois à la Direction centrale et dans une composante pilote. Un premier test a été mené sur le CLES – Certificat en langues étrangères de l’enseignement supérieur. Ce test a permis de mettre en place l’ensemble de la démarche, notamment sur le plan RGPD, et d’informer les acteurs sur ce projet en cours.
Nous allons maintenant passer la parole à Luc JARRY-LACOMBE, pour aborder plus précisément la technologie blockchain, puis nous entendrons Éric MIELKE, Directeur de U-Link, pour évoquer le lien avec le monde socio-économique. L’université de Lille a notamment développé une plateforme, Lilagora, visant à fédérer les anciens élèves et à diffuser des annonces des employeurs.
Au total, 23 personnes de 5 directions différentes de l’université se sont ainsi impliquées dans ce projet de transformation pour parvenir à la première étape que nous avons réussi à franchir ces derniers jours.
4. Avantages des standards blockchain pour les solutions de Digital Credentials
Contribution de Luc Jarry-Lacombe, cofondateur & CEO de BCdiploma. Je me présente brièvement, je suis cofondateur de Blockchain Certified Data, une société qui développe la solution BCdiploma. Je viens aujourd’hui évoquer la réussite de cette première étape du projet DemattestUlille, ainsi que le projet fr.EBSI. Dans les deux projets, la solution blockchain BCdiploma est utilisée pour configurer, émettre et partager des attestations numériques à valeur probante, appelées Digital Credentials.
Ces deux projets s’avèrent en effet liés très étroitement. Pour DemattestUlille, nous travaillons avec la Scolarité et l’équipe informatique de l’université de Lille, et pour le projet fr.EBSI, nous sommes opérateurs techniques du projet gouvernemental français sur la blockchain européenne, mené également par l’université de Lille.
Ces deux projets se rejoignent : l’Université de Lille sera l’un des premiers participants actifs pour l’usage diplôme sur la blockchain européenne EBSI.
Je précise par ailleurs que depuis 2018, nous avons développé, breveté et installé dans 120 institutions de 18 pays une solution permettant d’authentifier et de stocker des données dans un environnement décentralisé, dans le but de les rendre accessibles en un clic dans l’univers digital. Dans ce cadre, nous dématérialisons des attestations probantes pour qu’elles soient infalsifiables. Il s’agit ici d’une transposition des anciens diplômes papier au monde numérique. Cette transposition s’adapte aux smartphones ou aux réseaux sociaux professionnels.
Notre métier technique consiste à garantir que l’ensemble des données consultées à l’écran est authentique, et provient ainsi d’une source de données vérifiable par tous, grâce à une technologie blockchain. L’environnement blockchain présente en lui-même toutes les preuves de l’authenticité de ces données.
Je souligne que dans ce secteur des digital credentials, trois grands rôles sont à distinguer :
- L’étudiant diplômé, à qui nous rendons service.
- L’émetteur, c’est-à-dire l’Université de Lille.
- Le recruteur, à qui est présenté le document. Pour ce dernier acteur, le parcours d’utilisation doit s’avérer très simple pour s’assurer en un clic de l’authenticité du document.
Concernant le projet DemattestUlille, je souligne que nous parlons ici d’un domaine de pointe, et l’université de Lille représente l’un des établissements les plus avancés au monde dans la réalisation de projets blockchain à grande échelle, avec des normes ouvertes de type W3C.
Il convient ainsi de resituer ce projet dans le mouvement mondial de l’émergence des normes “Verifiable Credentials” du W3C. Ces normes définissent la manière dont nous allons pouvoir échanger dans le futur des données à valeur probante, avec un système standardisé. La Commission Européenne s’approprie cette norme dans le cadre de son projet blockchain communautaire EBSI. Pour ce qui nous concerne, nous la mettons ici en œuvre pour la première fois.
Tout ce qui a été mené avec l’université de Lille a été pensé pour une automatisation depuis le logiciel APOGEE, et a été pensé de manière interopérable avec Europass et les plateformes nationales.
Je vous présente un QR Code à l’écran, vous permettant d’accéder à une blockchain de test et de visualiser la puissance de cet outil.
J’en viens maintenant au projet fr.EBSI. Les projets EBSI présentent une dimension très intéressante, autour de la notion « d’identité auto-souveraine ». Il s’agit de pouvoir présenter simultanément des identifiants à des titres vérifiables, et de les partager librement. La philosophie sous-jacente consiste ici à estimer que les données appartiennent à la personne concernée, et que ces données doivent ainsi pouvoir être présentées sans reposer sur des sous-jacents centralisés.
Enfin, nous travaillons également de manière active sur la notion du wallet. Une fois les digital credentials délivrés, la question se pose en effet de permettre aux personnes de stocker ces informations tout au long de leurs vies dans un environnement décentralisé. Un étudiant conservera dès lors le contrôle de son wallet tout au long de sa vie, celui-ci étant rattaché à sa personne, et permettant de stocker ses diplômes. Ce domaine nous concernera tous dans les années à venir, et la Commission européenne demande aux Etats de se positionner avant 2023 pour établir quel sera le wallet, c’est-à-dire le portefeuille digital, de chaque citoyen.
Par ailleurs, l’un des objectifs du projet fr.EBSI est de donner les moyens de tester ces nouveaux outils à toutes les institutions qui le souhaiteraient. Nous proposerons ainsi des cas d’usage et des tests à de nombreuses institutions publiques l’année prochaine, dans le cadre de leur transformation digitale.
Contribution d’Éric MIELKE, Directeur de U-Link, Université de Lille :
Avec Lilagora, l’université de Lille a lancé depuis quelques années son réseau professionnel numérique. Ce réseau s’adresse à divers publics, dont :
- Les étudiants et les anciens étudiants – les alumni.
- Les partenaires, c’est-à-dire des entreprises ou des associations qui proposent des emplois ou des stages.
En effet, nous observons que les modes de recrutement évoluent ces dernières années. Les candidatures papier laissent peu à peu la place à l’e-recrutement et à l’e-réputation. Or, aujourd’hui, environ 20 % des curriculum vitae envoyés par les candidats se caractérisent par des erreurs dans les parcours et dans les diplômes. Ainsi, ce qui est proposé aujourd’hui permet aux recruteurs d’éviter de recourir à des cabinets pour contacter les scolarités universitaires pour vérifier la véracité des diplômes obtenus.
Lilagora s’avère également complémentaire d’un réseau comme LinkedIn, avec une partie CV Tech. L’étudiant peut importer le lien permettant à l’employeur d’accéder en un clic à l’attestation numérique de diplôme.
Depuis trois ans, Lilagora réunit ainsi près de 37 000 membres, inscrits volontairement. Ce réseau permet de développer un lien durable et profitable à tous les acteurs.
Conclusion de Perrine de COETLOGON
Pour conclure, nous essayons effectivement de simplifier l’expérience des étudiants, dans le partage des cursus et des diplômes. Pour l’université, ce projet doit également permettre de réaliser des économies, tant sur le plan financier qu’écologique. Dès lors, le numérique représente une solution, et nous espérons réellement contribuer à davantage de sobriété numérique. La blockchain apporte la brique d’authenticité qui manquait à internet. C’est ce qui rend cette solution si intéressante.
5. Questions
a. Pour BCdiploma, quel wallet avez-vous utilisé ? Avez-vous réalisé un benchmark ?
Perrine de COETLOGON : Je rappelle que notre identité numérique est actuellement réglementée par eIDAS, une réglementation européenne. La France met actuellement en œuvre les cartes d’identité électroniques, et nous disposerons tous, dans les années, à venir, de portefeuilles numériques comprenant divers éléments d’identité. Ce wallet pose cependant un certain nombre de questions.
Luc JARRY-LACOMBE : Il importe de réaliser que de nombreux industriels travaillent actuellement sur ces wallets, puisque les enjeux institutionnels sont majeurs. Nous avons commencé ce chantier avec une vue académique, par le biais du diplôme à stocker. Ce wallet fonctionne toutefois au-delà de l’inscription à l’université. Nous travaillons l’expérience utilisateur en vue d’une adoption facile pour tous les diplômés et citoyens, en masquant ce qui relève de la technologie complexe de la blockchain, qui ne concerne pas l’utilisateur final pour une adoption à grande échelle.
b. fr.EBSI et DemattestULille sont-ils des projets concurrents de diplome.gouv.fr ?
Pierre BOULET : Non, il s’agit ici de projets complémentaires. D’ailleurs, diplome.gouv.fr n’intègre pas, aujourd’hui, les diplômes de l’enseignement supérieur. Les usages ne sont pas les mêmes, par ailleurs, notamment à propos des diplômes obtenus à l’étranger. Notre projet EBSI s’inscrit dans ce cadre des mobilités internationales, et permet à des Etats différents d’échanger des données en toute confiance, en utilisant des standards internationaux.
Il en va de même pour Europass. L’EBSI est également une initiative européenne, et essaie d’être compatible avec ce projet Europass.
J’ajoute que l’EBSI n’intègre pas uniquement l’infrastructure blockchain de partage, mais également des registres qui certifient les émetteurs. BCdiploma effectue ce travail de certification, et j’ai dû prouver moi-même que je représentais bien l’université de Lille, un institut de formation reconnu et accrédité par le ministère de l’Enseignement supérieur. J’ai dû apporter des preuves sur ce sujet.
Demain, l’EBSI comprendra ainsi des registres des émetteurs autorisés par les différents gouvernements. Ces derniers seront par conséquent chargés d’actualiser ces registres.
Perrine de COETLOGON : J’ajoute également que nous avons dû réfléchir tôt aux interactions possibles entre notre projet et le Passeport Orientation Formation Compétences en cours de création dans les comptes Formation des actifs français. L’ensemble des établissements d’enseignement supérieur en France devra demain porter ses données vers un wallet où les Français pourront les retrouver.
c. Ces diplômes seront-ils visibles dans un CFN – Coffre Fort Numérique de type Digiposte ?
Luc JARRY-LACOMBE : Tout à fait. Nous remplaçons le diplôme par un lien URL, c’est-à-dire une chaîne de caractère qui pourra être stockée dans un coffre-fort numérique. En réalité, toutefois, ce stockage ne sera pas nécessaire, il ne sera pas utile d’ajouter une couche de sécurité à cette technologie blockchain.
Pour autant, Digiposte pourrait tout à fait être considéré comme un portefeuille permettant de centraliser ce type d’e-document.
d. Qu’en est-il du projet PC-SCOL – PEGASE : pourrez-vous migrer vos développements sans surcoût ?
Bénédicte GAUTIER : Cette autre question demande ce qu’il est en est du projet PC-SCOL, c’est-à-dire le projet PEGASE, le successeur d’APOGEE. Aujourd’hui, nous travaillons avec notre base de données d’APOGEE, et nous sommes tout à fait conscients que cette base de données sera remplacée chez d’autres acteurs à terme. Cependant, les objets étant clairement identifiés, nous savons qu’ils seront également manipulés demain également par PEGASE. Cette interopérabilité a ainsi d’ores et déjà été travaillée.
De plus, un interfaçage entre la base de données et la blockchain nous permet de nous connecter sur d’autres lieux de stockage.
Perrine de COETLOGON : J’ajoute que nous avons développé une API en interne, et que nous avons travaillé sur la question du stockage des liens. L’université est tenue de protéger les données de ses étudiants. Par conséquent, nous devions pouvoir gérer les liens. Le lien original sera ainsi conservé et pourra être renvoyé à l’étudiant qui l’aura égaré.
Par ailleurs, du fait d’une erreur ou d’une fraude lors de l’examen, il sera possible de révoquer le premier lien et de le rendre inaccessible.
Luc JARRY-LACOMBE : J’ajoute que le travail des équipes de Lilagora permet de stocker le lien sur la plateforme d’alumni. De plus, un usage courant consiste à partager son lien sous la forme de badge sur son profil LinkedIn. Enfin, le travail autour du wallet traite également de cette question. Les risques de perte se révèlent ainsi minimisés.
e. Avez-vous testé la technologie 2D-DOC ?
Perrine de COETLOGON : Une autre question porte sur la technologie 2D-DOC. Nous avons été financés, pour ce qui nous concerne, pour travailler sur la blockchain. Toutefois, nous avons bien entendu été amenés à rencontrer la technologie 2D-DOC ces dernières années, mais celle-ci s’avère moins intéressante sur le plan cryptographique.
Pierre BOULET : Par ailleurs, un QR Code figure sur le document papier pouvant être imprimé du diplôme, permettant dès lors de retrouver le lien original.
L’aspect décentralisé s’avère fondamental dans notre démarche, et chaque établissement doit pouvoir émettre des diplômes susceptibles d’êtres lus par les autres acteurs. L’aspect standard du format est ainsi intéressant, et les QR Code permettent également ce partage. La blockchain est cependant plus utile pour ce qui est de la pérennité de l’information et de son infalsifiabilité. Elle répond à l’ensemble de nos préoccupations.
Luc JARRY-LACOMBE : Je souligne également que l’enjeu est ici de stocker la donnée et ses preuves sur un sous-jacent décentralisé (une blockchain) qui demeurera stable et inaltérable durant une très longue période.
f. Quel est le coût de l’utilisation d’Avalanche pour cette application ?
Perrine de COETLOGON : Je précise qu’Avalanche désigne une blockchain que nous avons choisie pour son faible coût énergétique, notamment. Nous souhaitions en effet respecter certaines valeurs liées à l’éducation dans nos travaux, en ne recourant pas à une blockchain générant des coûts énergétiques considérables.
g. Quid de l’accrochage des données dans le Passeport Compétences de la Caisse des Dépôts ?
Luc JARRY-LACOMBE : Je souhaitais également répondre à une question portant sur l’obligation, depuis juillet 2021, pour tous les certificateurs et organismes de formation possédant des titres RNCP, de transmettre des données à la Caisse des Dépôts. Dans ce cadre, nous proposons des flux de données automatiques depuis les attestations blockchain émises vers ce coffre-fort.
Ressources
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